L'intéressée observait cette adresse à l'encre verte, essayant de reconnaître l'écriture d'une amie qui avait peut-être décidé de lui envoyer une carte postale en ces vacances estivales. Mais cette écriture ne lui disait rien et l'adresse était tout aussi étrange que ce sceau d'encre qui refermait l'enveloppe. Son père aussi avait été un peu interloqué par le courrier de sa progéniture mais il la lui avait donné avant de rejoindre le salon pour lire son journal, laissant ainsi Honora décacheter cette lettre qui allait changer sa vie.
La fillette relue plusieurs fois le parchemin sans oser comprendre, elle posa son regard opalin sur la liste des fournitures qui étaient jointes et qui ne recelait rien de ce qu'elle connaissait. Honora aurait pu croire à une blague ou à une quelconque stratégie publicitaire quelque peu tordu mais pourtant son cœur ne cessait de secouer sa poitrine au titre d’École de Sorcellerie. Elle se souvenait encore du jour où, terrorisé de voir son précieux chat se noyer devant ses yeux elle l'avait vu sortir de l'eau et s'envoler doucement jusque dans ses bras où il s'était réfugié trempé et tremblant. Ou alors de l'étrange crise aigu de vomissement de Ian lorsqu'elle l'avait surpris avec sa bande d'ami en train d'à nouveau voler les affaires de sa meilleure amie... Les événements étranges avaient égrainés sa vie d'enfant et cette lettre semblait enfin vouloir donner un sens à tout cela.
Elle était donc une sorcière, un tout nouveau monde semblait vouloir se dévoiler à elle mais pour cela il fallait que ses parents acceptent de la voir partir dans cette nouvelle école et non au collège de son quartier. C'est le pas hésitant et tout en prenant le temps de la réflexion qu'Honora rejoint ses parents au salon, se préparant à la discussion la plus importante de sa vie.




▬ " Attends, je suis certaine d'avoir ça là. " Le soleil printanier envahissait la bibliothèque et dispensait sa douce chaleur aux âmes studieuses qui s'y trouvaient. Honora avait soigneusement classée la pile de livres et de parchemins qui se trouvaient devant elle aussi elle n'eut guère de difficulté à glisser la prise de notes qui intéressait son amie Alice assise non loin. Si l'organisation était le fort de l'élève de Serdaigle on ne pouvait pas en dire autant du trio de garçons assis non loin qui donnaient l'impression de se noyer sous leurs parchemins. A cette époque ce lieu de savoir était prit d'assaut, même par les plus cancre de leur promotion car chacun savait que l'ultime ligne droite allait arriver. Bientôt ils devraient quitter les bancs de cette école qui les avait vu grandir et se faire une place dans ce monde qui s'assombrissait au dehors.
Contrairement à d'autres Honora était assez sereine, son savoir et ses talents ne lui avaient jamais fait défaut et elle savait quelle voie elle voulait suivre. Elle avait conscience que beaucoup de choses allaient se jouer durant ces derniers examens mais il ne servait à rien de s'ajouter de la pression, son esprit avait besoin de sérénité et c'est donc ce qu'elle entretenait avec un fin sourire qui dénotait un peu entre tous ces visages concentrés voire paniqués qui l'entouraient.
Elle fut l'une des rares à ne pas sursauter lorsque les enfants terribles des 6ème années trouvèrent utile de troubler durant un bref instant les révisions de leur aînés en lâchant quelques pétards magiques dans la sacro-sainte bibliothèque. Après un tel coup d'éclat ils furent obligés de filer en vitesse avant que la bibliothécaire outrée ne les attrape ainsi que quelques dernières années particulièrement offusqués. Cette animation imprévue fit légèrement rire la Serdaigle qui n’eut guère de peine à retrouver sa concentration, le cœur un peu allégé par ce divertissement.




▬ " Mais ils ne peuvent pas ! Comment osent-ils ?! " La ruelle sombre de Londres avait beau être faite pour les entrevus secrètes Honora ne pu retenir sa colère plus longtemps. Elle avait déjà tellement donné, tellement prouvé que cet énième obstacle était celui de trop, celui qui faisait voler son éternel sang froid. La sorcière s'en serait sûrement prit à son interlocuteur qui jouait les corbeaux de malheurs si seulement il n'avait pas eu ce visage amical qu'elle connaissait bien. Dans un demi-tour rageur elle fit voltiger sa cape qui luttait contre l'humidité environnante et continua de dispenser sa colère de quelques mots qu'elle voudrait sûrement oublier après. Elle en arrivait à se demander parfois les raisons qui la poussaient à lutter pour ce monde qu'elle n'aurait jamais connu sans l'arrivée de cette lettre l'été de sa onzième année...

Un craquement fit sursauter le spectateur de cette scène qui prit aussitôt peur, il glissa quelques mots d'adieux et disparu dans le même craquement qui avait résonné quelques temps plus tôt. Trop énervée Honora ne réalisa l'existence de cet enchaînement d'évènements que lorsqu'une main amicale se posa sur son épaule.

▬ " Honora tu dois venir. " Le sorcier ne savait pas encore ce qui avait mit la jeune femme dans cet état mais sa présence amicale et son calme teinté d'inquiétude fit l'effet d'une douche froid à Honora lorsqu'elle se retourna vers lui. Sa colère se mua aussitôt en crainte alors que son regard tenta de deviner ce qui se tramait.
▬ " Que ce passe t-il ? Est-ce que Marlene... " L'homme coupa nette l’inquiétude de la mère qui avait déjà vu bien trop d'horreur pour ne pas penser au plus tragique en de telle circonstance.
▬ " Non elle va bien. C'est Edgar, il a fait une mauvaise rencontre... " La jeune femme sentait que trop d'émotions se bousculaient dans son esprit, toutes aussi violentes les unes que les autres et son regard pâle se baissa vers le sol alors que ses doigts se joignaient pour tenter d'endiguer leurs tremblements.
▬ " Je ne sais pas si je pourrais... "
▬ " Tu feras de ton mieux. " Honora fini par acquiescer, s'accrochant à l'amitié de cet homme pour se rassurer alors qu'il l’entraînait à sa suite pour apparaître quelques instants plus tard à l'autre bout du pays. La jeune femme le suivi en songeant à ses anciens rêves d'avenir détruits. Elle n'aurait plus ses entrées au Ministère, du moins tant que cette guerre ne cesserait mais quel prix devraient-ils encore payer pour que cela ne cesse ? Elle avait cru l'espace de quelques mois que devenir mère l'aiderait à surmonter ces temps obscurs mais elle avait vite déchanté, trouvant dans cette naissance une nouvelle source infinie d'angoisse. Elle pourrait sûrement rebondir vers la médicomagie au vu du talent qu'elle s'était découverte mais encore fallait-il que leur monde trouve la voie de l'apaisement...




▬ " Alors elle a reçu sa lettre ? " C'est avec un fin sourire que Honora acquiesça, laissant la satisfaction de sa collègue s'exprimer. La médicomage écouta d'une oreille les paroles de la jeune femme qui était parfaitement capable de mener la discussion seule tandis qu'elle songeait à ce renouveau qui fleurissait depuis plusieurs années. Elle était heureuse que sa fille puisse enfin voir son monde sous un beau jour elle qui était née dans la plus grande noirceur. Poudlard l'appelait et bientôt elle se mettrait en route vers ce bel avenir, sans connaître les meurtrissures qui avaient rongé celui de sa mère.

Ce combat n'avait pas été vain, la victoire avait été leur mais à quel prix ? Ils étaient si peu à s'en être sorti et des âmes sombres vivaient encore au grand jour en criant à la repentance... Honora ne pouvait que prier pour que le meilleur soit devant eux. Après tout même ses propres échecs n'avaient pas été si difficile plus qu'elle avait ainsi pu trouver sa voie. Elle pouvait à présent aider le plus grand monde, certes pas de la manière dont elle avait imaginé mais c'était une façon plus concrète encore.

Mais elle n'oubliait pas ce qu'elle avait traversé et c'est bien pour cela qu'elle se trouvait à cette heure dans cette aile de Ste Mangouste avec une collègue bavarde à ses côtés. Cependant même cette dernière savait se retirer lorsqu'elle le devait et prit donc congé lorsqu'elles arrivèrent devant une porte.

▬ " C'est entendu ? On se retrouvera au Chemin de Traverse ce samedi pour faire ces courses ? " Honora acquiesça d'un signe de tête et salua son amie, attendant qu'elle disparaisse pour entrer dans la chambre devant laquelle elle s'était arrêtée. Elle observa ensuite un bref instant le numéro de cette pièce qui était occupée depuis déjà plusieurs années par la même résidente et qui le serait encore malheureusement longtemps. Dans une inspiration elle trouva un sourire sincère et entra dans la chambre d'un pas décidé.

▬ " Bonjour Alice. "





Une vérité implacable et la promesse de nouveaux morts. C'est ce qui avait guidé la dénommée Loreleï dans ce petit coin d'Irlande où elle avait élu domicile. L'artiste du village que chacun était persuadé de connaître depuis déjà bien longtemps faisait des merveilles avec ses doigts. La terre semblait si féerique sous son regard d'expert et son imagination. Tous connaissaient et appréciaient Loreleï, seules les commères du village trouvaient de quoi redire sur le célibat de cette ravissante quarantenaire mais après tout les traditions se perdaient... Tous avaient été présent pour l’inauguration de la statue de l'obscure romancier des années 20 originaire du pays et chacun avait eu son avis sur cette œuvre qui trônait à présent dans le square de la ville.

Bref il n'y avait rien d'étrange à signaler dans ce petit coin reculé de l'Irlande où les moldus vivaient paisiblement. Tout était tellement commun que personne ne s'inquiéta de voir quelques touristes traverser vivement la ruelle ce soir là... Mais il aurait peut-être fallu s'inquiéter un peu plus à ce petit groupe car en y regardant de près ils n'avaient guère l'apparence de touriste et avait l'air plutôt mal en point. L'un d'eux était même soutenu par ses camarades et semblait au bord de l'évanouissement mais ça on ne pouvait le remarquer qu'en y faisant attention, chose qui n'était pas dans les habitudes ici. A cette heure avancée ils ne trouvèrent personne sur la jetée et se dirigèrent vers la pointe rocheuse qu'on leur avait indiqué, une fois arrivée à destination l'un d'eux pointa sa baguette sur une pierre anodine et ils attendirent tous sous le vent froid du large qui fouettait la côte.

Ils étaient là depuis plusieurs minutes, assez de temps pour que les premiers commencent à s'inquiéter lorsque la charmante Loreleï vint à leur rencontre. Ses mains avaient retrouvé sa baguette poussiéreuse et elle avança prudemment vers le groupe qui se tourna vers elle.

▬ " Madame Greyclaw ? Nous savons qu'il ne faut pas vous joindre à la légère mais le professeur McGonagall nous avait expliqué... Nous avons besoin de votre aide. "

Honora stoppa sa marche à quelques pas d'eux et les observa chacun aussi attentivement que la clarté voilée de la lune le lui permettait. Ce n'était que des gamins amochés, du moins c'est l'apparence qu'ils donnaient et celui qu'elle décida de croire. Sans un mot elle s'approcha et se dirigea vers le plus mal en point qui avait sombré dans l'inconscience. Ses blessures n'avaient rien de jolies mais il vivrait après être passé sous son expertise.

▬ " Il viendra avec moi, vous vous repartez ou vous restez dites moi juste où il pourra vous retrouver. " Des voix s’élevèrent contre ces conditions mais celui qui semblait diriger accepta. Honora parti donc avec le blessé laissant derrière elle quelques soins utiles pour les blessures superficielles de ses camarades.

C'est ainsi qu'elle prit son rôle de médicomage de la résistance. Ils ne la dérangent cependant pas souvent respectant peut-être son désir d'être à l'écart de ce monde détruit où elle déplore tant de perte et où sa propre fille s'est perdue.