Elle attache une énième bouteille sur une branche encore libre de l'arbre qui trône juste devant la porte de sa baraque. Aujourd'hui elle est bleue ; comme les yeux de son frère avant qu'ils ne se ferment à jamais. Une autre bouteille pour un autre souvenir, une autre pensée, parfois elle n'y laisse qu'une photo ou un nom, en mémoire et hommage de ceux qui sont tombés depuis que tout à commencé. Son commencement à elle, c'était il y a trois ans, après la mort du célèbre Harry Potter, alors qu'elle tentait de fuir, comme tous les autres. Elle observe les bouteilles accrochées, jaunes, vertes, bleues. C'est le seul moment où elle pense à toutes ces choses en restant calme, le reste du temps ; elle souffre. Aileas n'est pas une enfant gâtée, elle n'est pas non plus issue d'une famille riche, ni pauvre par la même occasion. Elle était une douce gamine naïve et curieuse d'en apprendre plus sur le monde qui l'entoure. Elle avait une joie de vivre à toute épreuve et prenait volontiers du temps pour les autres. Attentive, calme et sensible, elle préférait de loin s'attarder sur les misères d'un papillon avec une aile brisée que sur les derniers potins de Poudlard. Elle n'était ni populaire, ni désavouée, elle prenait les choses comme elles venaient et faisait en sorte d'en tirer le meilleur. Impulsive et têtue, cela dit, elle n'hésitait jamais sur la prochaine décision stupide à prendre. Joueuse, intrépide, elle était bien souvent recouverte de bleus en retrouvant ses parents une fois les vacances arrivées. Et puis il y a eu ce jour. Cette fois. Elle a tout perdu. Son envie de grandeur, de voyage. Son ambition de devenir la prochaine Marie Curie sorcière. Son sourire. Ses amis. Sa famille. Son frère. Sa vie. Elle a tout perdu lorsqu'il est mort. Parce qu'elle se sent coupable. Parce qu'elle en veut à la terre entière. Parce qu'elle ne supporte plus de le voir sans cesse dans les visages inquiets. Parce qu'elle ne comprends pas comment elle fait pour rester encore debout. Parce qu'elle souffre de n'avoir pu mourir à sa place.

QUE PENSEZ-VOUS DU GOUVERNEMENT ACTUEL ? VOUS EN ACCOMMODEZ VOUS OU PAS DU TOUT ? — Le gouvernement ? C'est marche ou crève. Peu importe ce que vous voulez faire, c'est comme eux le veulent que l'on doit agir. Je ne supporte pas ce gouvernement, pas plus que je ne supporte de devoir me regarder dans un miroir pour me préparer le matin. Je fais avec parce qu'au fond on est bien obligés. Je pourrais m'enfuir, je sais, mais j'ai déjà essayé et regardez où ça m'a amené. Je vous le dis, faites comme ils l'entendent.
QUE VOUS ÉVOQUE HARRY POTTER ET L'ORDRE DU PHOENIX AUJOURD'HUI ? — Une bonne blague. Où était l'Ordre quand ils ont tué Harry Potter ? Où était cette grande organisation de rebelles quand tout a foutu le camp ? Ca me désole de me dire que tout reposait sur un gamin. Il avait mon âge ce Harry Potter, et je ne vois pas comment est-ce qu'on a pu lui laisser autant de responsabilité alors qu'il n'était qu'un enfant ! C'est ... Ouai, je vais m'arrêter là.
LA VALEUR DU SANG, LE MARTYRE DES NÉS-MOLDUS, QUE PENSEZ-VOUS DE TOUT CELA ? — Je n'ai jamais prêté attention à la valeur du sang avant toutes ces conneries et c'est pas aujourd'hui que ça va changer. Un sorcier est un sorcier, qu'il soit de parents moldus ou sorciers ça revient au même. Nous avons tous les mêmes pouvoirs, tous les mêmes capacités à pouvoir user de sortilèges et vivre dans un monde magique alors quel différence le sang peut-il bien faire ? On se moque des moldus pour leurs façons de réagir face aux différences - comme avec les religions - mais au final on est comme eux si le fait d'être sorcier se résume à son sang. Laissez-nous donc vivre.
AVEZ-VOUS FAIT DES CHOSES HORRIBLES POUR SURVIVRE ? AVEZ-VOUS DU TRAHIR DES AMIS ? VENDRE DES NOMS POUR NE PAS ÊTRE PUNIS ? — J'ai tué mon frère. J'ai tué le seul être qui comptait plus que n'importe quoi dans ma vie. Je l'ai fait parce qu'il n'y avait plus d'autre alternative à notre fuite. Je l'ai fait parce que j'ai été faible de penser qu'ils me tueraient après ça. Que je subirais le même sort. Au final ils m'ont laissé repartir morte de l'intérieur.
EST-CE QUE VOUS AVEZ DU FUIR LE CONFLIT ET LE GOUVERNEMENT OU, AU CONTRAIRE, L'AVEZ VOUS ACCEPTE ? — J'ai fuit et ça m'a mené vers la mort. Aujourd'hui je ne fuis plus, ça ne sert à rien. On finira tous par crever dans ce conflit, que ce soit ici ou ailleurs alors autant rester à sa place et attendre.
QUEL SOUVENIR EST LE PLUS DOULOUREUX POUR VOUS, CELUI QUI VOUS HANTE JOUR ET NUIT ? — Les larmes de mon frère avant qu'il ne meure, avant que je ne le tue. Je l'ai vu souffrir. Je l'ai vu mourir. Les épouvantards prennent la forme de nos plus grandes peurs, mais bien souvent on ne les affronte que sous cette forme. Parfois elles se réalisent et votre vie devient le cauchemar.